Si le procédé "courant" permet au thé aromatisé une longue conservation, il est aussi beaucoup plus complexe. Les fleurs doivent être cueillies avant la levée du soleil, quand leur parfum ne se dégage pas encore. On détache des étamines sur place que l'on conserve dans une boîte fermée. Vient ensuite l'étape d'aromatisation qui doit commencer la même matinée. D'ordinaire, on se procure d'avance un thé vert de qualité provenant de la province de Thái Nguyên (Nord). Pour un kilo de thé, il faut recueillir des étamines sur 800-1.000 lotus (chaque fleur en donne 90-100 grammes).
L'aromatisation se fait dans un vase en porcelaine où l'on dépose par couches, en alternance, thé et étamines. Le thé est ensuite séché, avant être remis dans le vase. Ainsi de suite, à 8 reprises, pendant presque un mois. Le thé est ensuite séparé des étamines au moyen d'un van. Un travail des plus méticuleux qui explique le prix exorbitant du trà sen : quatre millions de dôngs le kilo (contre 100-150.000 de dôngs pour le thé normal).
Ðoàn Thi Vinh, 60 ans, domiciliée au 10, rue Hàng Ðiêu, dans le vieux quartier de Hanoi, est parmi les rares Hanoiens pratiquant encore la préparation artisanale du trà sen. Un métier traditionnel hérité de ses beaux-parents. Durant la saison de floraison des lotus, sa maison se transforme en atelier où s'affairent une dizaine de personnes, tous membres de sa famille. "Autrefois, les champs de lotus s'étendaient à perte de vue sur le lac de l'Ouest. Ils ne sont plus que peau de chagrin, à cause de l'urbanisation", déplore-t-elle. Mais les affaires de sa famille marchent plutôt bien. Car, "de plus en plus, les gens veulent revenir aux valeurs essentielles, et le thé en fait partie".